top of page
Rechercher
Photo du rédacteurMe Marianne Leloup

TA Paris référé 19/06/2024 - annulation refus de conversion salarié post OQTF RECE



Dans ce dossier notre cliente taïwanaise avait demandé en septembre 2023 la conversion de son titre de séjour étudiant en une carte RECE (recherche d’emploi création d’entreprise).

 

La préfecture lui avait envoyé une décision de refus assortie d’une OQTF (obligation de quitter le territoire français) et d’une IRTF (interdiction de retour sur le territoire français) d’un an. Ces décisions étaient totalement infondée et illégales étant donné que notre cliente remplissait les conditions, sauf que malheureusement elle ne les avait jamais reçues car elle n’avait pas notifié son changement d’adresse. Ces décisions n’ont donc pas été contestées à l’époque.

 

En janvier 2024, n’ayant aucune nouvelle de sa demande de titre (puisqu’elle n’avait pas reçu l’arrêté avec l’OQTF) notre cliente, qui entre temps avait trouvé un emploi, a demandé une conversion vers un titre de séjour salarié pour lequel elle a reçu une « attestation préfectorale ». Sa demande a par la suite été clôturée en raison de l’OQTF.

 

Nous avons contesté dans le cadre d’un recours en excès de pouvoir ainsi que d’un référé-suspension cette décision de clôture, et la juge des référés a fait droit à notre demande non seulement en suspendant la décision de rejet de TDS salarié et en ordonnant la délivrance d’une APS l’autorisation à travailler, mais également en enjoignant au préfet de réexaminer la situation de notre cliente. Cette dernière a depuis obtenu son titre de séjour et pu reprendre le cours normal de sa vie !


"Vu la procédure suivante :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La juge des référés

 

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 mai et 6 juin 2024, représentée par Me Leloup, demande au juge des référés :

1°) de suspendre, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, l’exécution des décisions implicites du préfet des Hauts-de-Seine en date du 7 mars 2024, du 17 mai 2024 et du 18 mai 2024 ;

2°) d’enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine ou au préfet territorialement compétent, de lui délivrer dans l’attente de la décision au fond une autorisation provisoire de séjour dans un délai de trois jours, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne l’urgence : l’urgence est présumée ; en outre, les décisions implicites en litige préjudicient de manière grave et immédiate à ses intérêts car son contrat à durée indéterminée, source unique de ses revenus, a été suspendu par son employeur et elle se retrouve dans une situation d’extrême précarité.

En ce qui concerne le moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée :

- les décisions implicites sont insuffisamment motivées ;

- elle sont dépourvues de base légale dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire du 8 décembre 2023 a nécessairement été abrogée le 7 mars 2024, date à laquelle une attestation préfectorale lui permettant de se maintenir de façon régulière sur le territoire français lui a été délivrée ;

- elles sont entachées d’une erreur de droit tirée de la méconnaissance de l’article L.421-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

- elles sont entachées d’une erreur manifeste d’appréciation et de méconnaissance de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que l’arrêté du 8 décembre 2023, notifié le 19 décembre 2023, a acquis un caractère définitif et que la décision du 7 mars 2024 est purement confirmative, les conclusions de la requête tendant à obtenir l’annulation de l’arrêté du 8 décembre 2023 sont par conséquent tardives et devront être rejetées comme entachées d’une irrecevabilité manifeste.

Vu :

- les autres pièces du dossier,

- la requête enregistrée le 27 mai 2024 sous le n° 2413575 par laquelle la requérante demande l’annulation des décisions attaquées.

Vu :- le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; - le code de justice administrative.

Mme Salzmann, vice-présidente de section, a été désignée par le président du tribunal pour statuer sur les demandes de référé.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Au cours de l’audience publique tenue le 12 juin 2024 en présence de Mme Latour, greffière d’audience, Mme Salzmann a lu son rapport et entendu les observations de Me Silvestre substituant Me Leloup représentant qui reprend ses écritures.

Le préfet des Hauts de Seine n’est ni présent ni représenté.La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. , ressortissante taïwanaise née le 19 décembre 1994, est entrée en France le 28 août 2018 sous couvert d’un visa « étudiant » valable du 20 août 2018 au 20 août 2019. Le 13 septembre 2019, elle a bénéficié d’une carte de séjour « étudiant », valable du 21 août 2019 au 20 août 2020, régulièrement renouvelé, dont le dernier était valable du 4 décembre 2022 au 3 décembre 2023. Elle a sollicité, le 21 septembre 2023, la délivrance d’un titre de séjour portant la mention “Recherche d’emploi - création d’entreprise” sur le fondement de l’article L.422-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par un arrêté du 8 décembre 2023, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour


2 sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l’a interdit son retour en France pour une durée d’un an. Par une lettre du 16 janvier 2024, notifiée le 17 janvier 2024, a sollicité la délivrance d’un titre de séjour portant la mention « salarié ». Le 18 janvier 2024, elle a déposé sa demande de titre de séjour « salarié » sur le site internet de la préfecture des Hauts-de-Seine « démarches simplifiées » en vue d’une convocation et a reçu une attestation de dépôt de sa demande ; le 7 mars 2024, la préfecture des Hauts de Seine lui a délivré une attestation mentionnant que sa demande de titre de séjour « salarié » déposée le 18 janvier 2024 était en cours d’instruction. Concomitamment, le 7 mars 2024, un courriel de l’agent instructeur de la préfecture lui a appris qu’elle avait fait l’objet d’un refus de titre de séjour assorti d’une mesure d’éloignement en date du 8 décembre 2023, notifié le 19 décembre 2023 ; le 15 mars 2024, la messagerie de l’intéressée sur son espace en ligne « démarches simplifiées » a indiqué qu’elle faisait l’objet d’un refus de titre de séjour assorti d’une obligation de quitter le territoire français, en date du 8 décembre 2023 et que sa messagerie correspondant à sa demande de titre de séjour « salarié » a été désactivée. Par la présente requête, la requérante demande au juge des référés, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, d’ordonner la suspension de l’exécution des décisions implicites des 7 mars 2024 , 17 et 18 mai 2024 par lesquelles le préfet des Hauts-de-Seine a clôturé l’instruction de sa demande, rejeté sa demande de titre de séjour portant la mention « salarié » et rejeté la demande de rendez-vous en préfecture afin de déposer une demande de titre de séjour « salarié ».

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 521-1 du code de justice

administrative :

2. Il résulte de l’instruction que les courriels de la préfecture des Hauts-de-Seine versés au dossier, en date du 7 mars 2024, indiquent successivement, d’une part, que la demande de changement de statut de est en cours d’instruction et d’autre part, que à la suite de sa demande du 21 septembre 2023, - laquelle concernait une demande initiale de titre de séjour « Recherche d’emploi - création d’entreprise »-, a fait l’objet d’un arrêté portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour pour un an à laquelle elle doit se conformer. Ce dernier courriel, qui s’est accompagné le 15 mars 2024 de la désactivation de la messagerie en ligne de correspondant à sa demande de titre de séjour « salarié », doit être regardé comme révélant un refus opposé à sa demande de titre de séjour « salarié » sollicitée par un courrier postal, en recommandé, du 16 janvier 2024, auquel étaient jointes des pièces justificatives, et déposée en ligne sur le site « démarches simplifiés » le 18 janvier 2024. Par conséquent, eu égard à l’existence de cette décision de refus révélée le 7 mars 2024, aucune décision implicite n’a pu naître les 17 et 18 mai 2024 de sorte que

est fondée à demander la suspension de la seule décision du 7 mars 2024.

En ce qui concerne la condition d’urgence :

3. La condition d’urgence à laquelle est subordonné le prononcé d’une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre. Il appartient au juge des référés d’apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l’acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l’exécution de la décision soit suspendue. L’urgence doit être appréciée objectivement et globalement compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’affaire.

4. Pour justifier de l’urgence à suspendre l’exécution de la décision, , titulaire d’un master 1, qui était en situation régulière depuis 2018, qui soutient sans être contestée et en produisant de très nombreux mails pour connaître l’état d’avancement de son dossier, n’avoir n’a pas eu connaissance de la mesure d’éloignement qui lui aurait été notifiée le 19 décembre 2023, son dossier de demande « Recherche d’emploi - création d’entreprise » étant d’ailleurs mentionnée le 10 janvier 2024 comme accepté, et, en outre, ses demandes de titre de séjour « salarié » étant mentionnées à plusieurs reprises comme étant en cours d’instruction, fait valoir que la décision attaquée lui porte un préjudice grave et immédiat, dès lors qu’elle est placée en situation de précarité, dans l’impossibilité de subvenir à ses besoins et de travailler. Il résulte de l’instruction que la société Meotec, qui emploie en contrat à durée indéterminée depuis le 20 novembre 2023, a informé l'intéressée que, du fait de sa situation administrative, son contrat de travail serait suspendu à compter du 18 mai 2024 et qu’elle ne percevrait pas de rémunération. Ainsi, compte tenu de ces éléments,justifie d’une situation d’urgence. La condition d’urgence au sens de l’article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée en l’espèce comme remplie.

En ce qui concerne l’existence d’un moyen propre à faire naître un doute sérieux :

5. En l’état de l’instruction, le moyen soulevé tiré de ce que la décision du 7 mars 2024 est dépourvue de base légale est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

6. Il résulte de ce qui précède que les deux conditions requises par l’article L. 521-1 du code de justice administrative étant satisfaites, il y a lieu de suspendre la décision du 7 mars 2024.

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

7. Aux termes de l’article L. 511-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais ».

8. L’exécution du présent jugement implique nécessairement que le préfet de police ou tout préfet territorialement compétent procède au réexamen de la situation dedans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente ordonnance et, dans l’attente, lui délivre, dans un délai de dix jours à compter de la notification de la présente ordonnance, une autorisation provisoire de séjour l’autorisant à travailler, valable jusqu’à ce que ledit réexamen ait été effectué. En revanche, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 800 euros au titre des frais exposés par et non compris dans les dépens.

 

ORDONNE :

Article 1er : L’exécution de la décision du 7 mars 2024 par laquelle le préfet des Hauts-de- Seine a rejeté la demande de titre de séjour « salarié » de est suspendue.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police, ou à tout préfet territorialement compétent, de procéder au réexamen de la situation de dans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente ordonnance et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l’autorisant à travailler, valable pendant ce réexamen, dans un délai de dix jours à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 3 : L’Etat versera à une somme de 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à l’intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police et au préfet des Hauts de Seine. Fait à Paris, le 19 juin 2024."


Me Leloup

12 vues0 commentaire

Commentaires


bottom of page